B comme blog

Intérieur / extérieur

Alphabet fantaisie, XVIe siècle

Voici le B que Barthes, Bovary, Borges, buvard ou brouillon n’auront pas, en tout cas si la formule lancée voici dix jours ne change pas (une lettre, un mot, une chronique). Me voilà donc à la tête de B comme BLOG pour dire tout ce que j’ai sur le cœur. Il y a presqu’un an, je suis sur un bateau reliant Ischia à Naples. Je viens de lire Sukkwan island, un roman qui m’a secouée. Alors, je prends un petit carnet que-j’ai-toujours-dans-mon-sac et j’écris des lignes et des lignes sur ce roman. Je sens que quelque chose se passe, que ce n’est pas un hasard si toutes ces phrases viennent aussi facilement. Sans que je le sache encore, la première chronique est née. Le nom du blog vient après, sans rapport avec son île ou son livre de naissance (que je crois). L’expression que j’ampute très vite de son trop triste déserte et que je transforme en affirmation enthousiaste, sort spontanément d’une conversation exaltée sur le projet. Enfin, je lance la petite affaire îlienne sur le vaste océan d’Internet.  Et maintenant, de temps en temps, on me demande Et le blog ? comme on dirait Et les enfants ? ou Et le travail ? Alors pour cette cinquantième chronique, B comme BLOG.

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Roman, genre immortel ?

Rouvrir le roman, Sophie Divry, Editions Noir sur Blanc, 2017

Je découvre Sophie Divry. Pas encore 40 ans, auteure de quatre romans dont deux très remarqués, annonce la quatrième de couverture, mais à côté desquels je suis passée, elle publie un essai généreux, nourri et enthousiaste sur le genre roman. Pas si fréquent qu’une jeune romancière ni normalienne, ni universitaire, ni monstrueusement connue, s’avance sur ce territoire du penser-la-littérature. Qu’explore cette aventureuse aventurière ?

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A comme alphabet

À tout seigneur tout honneur

Aphabet fantaisie, XVIe siècle

Les sujets du concours d’entrée à la Femis (l’École nationale supérieure des métiers de l’image et du son) viennent de tomber. Cette année, les trois mots pour l’épreuve du dossier personnel d’enquête sont, au choix, promesse, rideau, sourire. Des travaux de quelle commission, peut-être passionnée, sortent ces sujets ? De quoi sont faits les débats ? L’idée de partir d’un seul mot pour créer me fascine. Preuve que les mots se tiennent entre eux, que chacun est capable d’en tirer d’autres, porteurs d’idées, d’émotions, de références culturelles. Sorte de démultiplication des pains, de bombe à fragmentation, d’éclosion du multiple. Un devient plein. Cela m’a donné une idée de nouvelle chronique pour ce blog, que je pense mener de A à Z, en commençant par… le début. Alors, à tout seigneur tout honneur : A comme ALPHABET. 

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Sens de lecture

l’absence, Anna Boulanger, Le Tripode, 2016

Je ne sais pas pourquoi mais j’aime bien me rappeler ce qui m’a conduit à un livre. Je le fais parfois dans ce blog. Je le fais souvent quand je parle d’un livre à quelqu’un (je sens d’ailleurs que ça agace et qu’on aimerait bien que j’en arrive au fait, ce qui est peut-être déjà votre cas, en ce moment, mais j’ai appris à supporter mes détours et les effets qu’ils provoquent). La première fois que j’ai entendu parler de ce livre, il y a deux semaines, c’était dans une formation que j’animais sur le métier d’éditeur. J’avais proposé au petit groupe d’apprentis de choisir dans l’immensité éditoriale une couverture qu’ils trouvaient réussie et d’expliquer pourquoi. Parmi les couvertures sélectionnées, il y avait celle-ci.

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Démocratie es-tu là ?

La lucidité, José Saramago, traduit du portugais par Geneviève Leibrich, Le Seuil, 2004

José de Sousa Saramago (1922-2010)

J’avais essayé de le lire voici quelques années, cinq ans et demi exactement, puisque j’ai récemment retrouvé dans ses pages un chèque, non encaissé, daté du 8 août 2011. Intérêt de certains marque-pages. Je n’étais cependant pas parvenue à m’attacher à ce texte perçu alors comme ardu, froid, lisse, compact. Je l’avais choisi après l’enthousiasme de L’aveuglement (1997), dans lequel José Saramago conte la diffusion d’une mystérieuse maladie aveuglante. En quelques semaines, toute une population contaminée retourne à la sauvagerie. La lucidité est aussi une fable. Elle prend pour situation initiale le raz-de-marée du vote blanc dans une capitale lors d’élections municipales. Effet boomerang d’un vote qui produit du chaos, démocratie prise à son propre piège. Continuer la lecture de Démocratie es-tu là ?

Le tigre n’est pas mort 2

Mallarmé et moi, Raphaël Meltz, Editions du Panama, 2006

Un 2, ce n’est pas habituel ici, c’est même la première fois. Cela n’annonce pas cependant toute une saison sur la non-mort du Tigre. Urbs m’ayant ouvert l’appétit, j’ai eu envie de lire d’autres écrits de ce drôle de Raphaël Meltz. Son premier roman, Mallarmé et moi est paru dans une maison qui a disparu depuis. A sa lecture, il s’est passé quelque chose d’assez habituel quand je ne suis pas une œuvre dans son ordre d’écriture. J’ai été déçue de voir que ce que j’avais découvert (et aimé), était déjà là, avant. Un peu comme si j’avais été trompée. Je m’explique. Continuer la lecture de Le tigre n’est pas mort 2

Le tigre n’est pas mort

Urbs, Raphaël Meltz, Le Tripode, 2013

Honnête. Si je n’avais qu’un mot pour parler de ce roman, c’est ce que je dirais. Je rassure immédiatement ceux qui aiment les chroniques variant entre 800 et 900 mots et je déçois les adeptes du très court : la longueur de celle-ci devrait être équivalente aux précédentes. Déjà, je me sens contaminée (mais j’ai de solides prédispositions en la matière) par un des procédés d’écriture d’Urbs, la digression. Vite, ajoutons quelque chose d’accrocheur pour ne pas perdre si tôt notre sympathique lecteur, abonné ou pas (je suis très ouverte), lancé dans cette 43ème chronique (déjà ? s’étonnent les rêveurs). C’est un roman drôle, loufoque, profond, érudit, picaresque et singulier (je fais gaffe quand même, je crois que je frise le cliché). Continuer la lecture de Le tigre n’est pas mort

La conquête de l’enfance

Les cosmonautes ne font que passer, Elitza Gueorguieva, Verticales, 2016

Comment restituer l’enfance en littérature ? Comment représenter cette période, ces moments lointains, passés au mystérieux tamis du temps ? Pourquoi, lecteurs, entrons-nous parfois si aisément dans une enfance qui n’entretient que de minces rapports avec la nôtre, mais avec laquelle nous percevons volontiers une familiarité ? Qu’est-ce qui nous fait régulièrement revenir vers ce premier temps de la vie ? Je me suis à nouveau plongée dans ces questions avec le premier et drôlissime roman d’une jeune femme d’origine bulgare, Eltiza Gueorguieva, intitulé Les cosmonautes ne font que passer. Continuer la lecture de La conquête de l’enfance

Sur une île j’écrirai

Anguille sous roche, Ali Zamir, Le Tripode, 2016

Je ne connais rien à la littérature de l’océan Indien. Je n’ai lu ni le comorien Mohamed Toihiri (La république des Imberbes, 1985), ni le malgache Jean-Luc Raharimanana (L’arbre anthropophage, 2004), ni le réunionnais Axel Gauvin, ni la mauricienne Natacha Appanah dont le dernier roman, Tropique de la violence prend pour cadre l’île française de Mayotte. Je n’ai foulé aucune de ces terres lointaines, ne sais pas grand-chose de leur histoire, mais je viens de finir Anguille sous roche d’Ali Zamir, Comorien de 27 ans. C’est un roman-phrase de 320 pages qui prend pour temps de narration la noyade d’une jeune fille dans l’océan reliant et séparant deux îles de l’archipel des Comores. Déroulé d’une histoire avant engloutissement annoncé. Continuer la lecture de Sur une île j’écrirai

Sur les traces de Duras

Lointains souvenirs, écrits de Marguerite Duras, Flore, préface de Laure Adler, Contrejour, 2016

L’origine de ce livre est à la fois familiale et littéraire. Les grands-parents de Flore ont vécu en Indochine et la photographe a lu, annoté, Marguerite Duras. Elle s’est rendue à Saïgon, Sadec, les lieux du Barrage contre le Pacifique, de L’Amant et en a rapporté une série de photos. Le tout fusionne dans un album traversé par l’écho, le balancement entre textes de Duras et images, sensuelles, de Flore.

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par Isabelle Louviot